Ce travail de thèse s’inscrit dans les travaux anglo-saxons de la Critical Discourse Analysis (CDA) par l’analyse critique de discours littéraires, qui est assumée moins comme une discipline que comme une méthode, permettant d’articuler l’analyse de textes littéraires – en l’occurrence contemporains – à la critique des conditions de production, y compris idéologiques, dans lesquelles ils paraissent.

Or c’est précisément de la proclamation de la fin des idéologies (Daniel Bell) et de l’Histoire (Francis Fukuyama), que s’impose au tournant des années 1970, l’absence d’alternative néolibérale (Margaret Thatcher) garantissant son triomphe sans partage – à la fois comme régime économique, politique, social, culturel et existentiel – qui jusqu’au xxi^e siècle a non seulement tourné à l’impasse, mais encore à la production (industrielle et métaphysique) continue du « désert », poursuivant en ce sens la réalisation de la prédiction nietzschéenne du « nihilisme » au xix^e siècle.

Aussi c’est face aux sempiternels discours (post)modernes de validation et de légitimation du néolibéralisme qui dissimulent, derrière son « évidence », le nihilisme de son idéologie, qu’un certain nombre d’écrivains s’engagent au contemporain, venant par là redéfinir et transitiviser politiquement l’engagement littéraire pour le xxi^e siècle.

A partir de trois œuvres principales – Théorie du Bloom (2000) de Tiqqun, Tomates (2010) de Nathalie Quintane et Personne ne sort les fusils (2020) de Sandra Lucbert – mises en perspective d’un ensemble d’œuvres littéraires contemporaines et d’essais relevant des sciences humaines (métaphysique, économie, histoire, sociologie, psychanalyse…), nous proposons l’analyse critique des évolutions du néolibéralisme en ce début de siècle – à travers l’individualisme, les processus de fascisation et de transformation de son intervention (infra)idéologique –, tout en envisageant inextricablement les moyens proprement littéraires dont les scribes de ce corpus se dotent, afin de tenter peut-être moins d’échapper à l’inné (Idéologie Nihiliste néolibérale) que de créer quelques brèches dans/et quelques alternatives à, son impasse apparente.